pritzker prize 2021, un nobel d'architecture français et engagé

Cette année, le Pritzker Prize, considéré comme le prix nobel d’architecture, a été attribué au duo d’architectes français Anne Lacaton et Jean Philippe Vassal. Une décision plutôt novatrice à plus d’un titre.

Créé en 1979, ce prix récompensait plutôt les “starchitectes” jusque dans les années 2000 : Ieoh Ming Pei en 1983, Frank Gehry en 1989, Tadao Ando en 1995, Renzo Piano en 1998…

Dans le palmarès, il y avait jusqu’ici seulement deux français (Christian de Portzamparc et Jean Nouvel) et une faible minorité de femmes, dont Zaha Hadid en 2004 et le duo irlandais Yvone Farrell et Shelley McNamara l’année dernière.

Alors on peut se réjouir que cette année célèbre à la fois UNE architecte et une agence française, avec, cerise sur le gâteau, une démarche durable et sociale, symbolisant l’architecture du “monde d’après”.

Anne Lacaton et Jean Philippe Vassal se sont rencontrés à l’école d’architecture de Bordeaux, et ont fondé leur agence en 1987, en reprenant à leur compte la citation de Mies Van der Rohe “less is more” de manière radicale.

Dès le début de leur carrière, Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal ont constamment élargi la notion de durabilité pour être comprise comme un véritable équilibre entre ses piliers environnementaux et sociaux. Leur travail a abouti à une variété de projets qui adressent la responsabilité dans ces trois dimensions.
— jury du pritzker prize
maison privée au Cap Ferret

maison privée au Cap Ferret

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Pourquoi de manière radicale ? parce qu’en plus de formes minimalistes, ils privilégient des matériaux économiques, voire bruts en essayant de respecter le pré-existant, qu’il soit naturel ou architectural.

L’un des plus beaux exemples est la maison privée au Cap Ferret ci-dessus qu’ils ont construite sur pieux, en l’intégrant parmi les pins sans les détruire.

Un autre exemple est la réhabilitation du Palais de Tokyo ci-dessous. Plutôt que rénover à grands frais, ils ont fait le choix de révéler la structure brute de l’architecture : une “friche” offrant les espaces et les perspectives au regard, sans hiérarchie.

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palais de tokyo

réhabiliter plutôt que démolir

Par leurs idées, leur approche de la profession et les bâtiments qui en résultent, ils ont prouvé qu’un engagement pour une architecture restauratrice à la fois technologique, innovante et écologiquement responsable peut être poursuivi sans nostalgie.
— jury du pritzker prize

mais leur travail le plus représentatif est constitué de grands bâtiments, réhabilitation de logements sociaux ou d’institutions culturelles, aux formes simples, très ouverts, souvent modulables, comme le FRAC du Nord Pas de Calais, l’Ecole d’Architecture à Nantes, ou des logements sociaux à Bordeaux, Saint Nazaire ou Paris.

On peut peut-être juste regretter que ces projets soient parfois un peu monotones.. Et qu’au delà de la démarche écologique en tant que telle, certains matériaux utilisés ne le soient pas toujours et que leur efficacité énergétique puisse être discutée. Même si j’adhère à la démarche évoquée par Anne Lacaton ci-dessous, pour moi elle manque un peu de naturalité et de poésie : la limite entre épure et simplisme est parfois ténue... Mais ce n’est que mon avis, je vous laisse vous faire votre opinion !

Une bonne architecture est ouverte - ouverte à la vie, ouverte pour renforcer la liberté de chacun, où chacun peut faire ce qu’il doit faire. Elle ne doit pas être démonstrative ou imposante, mais elle doit être quelque chose de familier, d’utile et de beau, avec la capacité pour soutenir tranquillement la vie qui s’y déroulera.
— Anne Lacaton